Seydina Ndiaye: « Il y a de vrais amis…mais pas beaucoup »
« Il y a des valeurs, il y a de vrais amis — il y en a, oui, mais pas beaucoup. », a répondu Seydina à propos de l’amitié, lors de l’entrevue accordée à Afrikcaraibmontreal. Musicien d’origine sénégalaise établi au Québec depuis environ 10 ans, Seydina (Ndiaye) partage dans cette entrevue sa passion pour la musique et sa vision authentique de la vie après la sortie de son double single Xaarit (Amitié) et Deug (Vérité) en août 2025. Entre attachement à la vraie amitié et à la vérité, il dévoile une philosophie empreinte de sincérité et de valeurs humaines. Sa musique, ancrée dans le cœur et ouverte au monde, devient un pont entre les cultures.
Afrikcaraibmontreal (ACM): Bonjour Seydina,
Vous êtes installé à Montréal depuis environ dix ans, et dès le début, vous avez été bien connu et accueilli dans le milieu artistique, surtout au sein de la communauté sénégalaise. Vous accompagnez souvent d’autres artistes, non seulement du Sénégal, mais aussi d’autres pays. Par contre, on attend toujours plus de chansons de vous-même. Où en êtes-vous par rapport à votre répertoire?
Seydina: Moi, j’ai écrit beaucoup de chansons, même certaines qui ne sont pas encore sorties. Il y a de nouvelles chansons que je prépare à sortir. Mais de temps en temps, comme pour la plupart des artistes, il y a des boulots autres que la musique. J’écris toujours de la musique, il y en a beaucoup, parce que je me prépare à sortir un album. Les deux singles qui sont sortis font partie d’un projet. J’ai déjà sorti un single, Diamonds, mais c’était pour une série de films sénégalais. Je travaille actuellement sur un vrai album.
ACM: Par rapport à l’industrie musicale ici, pensez-vous que les albums sont toujours d’actualité? On entend souvent dire que le public n’achète plus de disques, et qu’il vaut mieux sortir seulement quelques morceaux de temps en temps.
Seydina: Oui, ça, c’est vrai. C’est parce que sortir un single, c’est plus facile pour montrer aux gens que tu es toujours là. On sort des albums pour les mettre sur les plateformes, mais pour un single, il y a des artistes qui en sortent tous les deux ou trois mois pour se manifester sur YouTube, TikTok, etc. Les concerts rapportent le plus d’argent, mais ça dépend du format. Il y a des concerts où on ne te paie pas assez, et d’autres, comme certains festivals, où ils paient bien — mais tout dépend du niveau de notoriété, du nom du chanteur, etc.
ACM: Vos deux dernières chansons Deug (La vérité) et Xaarit (L’amitié) sont sorties au mois d’août 2025. Parlons d’abord de cette dernière: que signifie l’amitié pour vous? Très souvent, on parle d’amitié alors qu’on n’est que de simples connaissances. Quel est, pour vous, le véritable sens de l’amitié?
Seydina: Pour moi, l’amitié, ce n’est pas juste se voir tout le temps ou toujours parler ensemble. Non, ça, ce n’est pas de l’amitié, c’est, comme tu dis, une connaissance : tu me connais, je te connais. Mais l’amitié, c’est comme quand tu construis quelque chose, c’est les fondations. Quand on dit « c’est mon ami », c’est souvent une façon de parler. Mais pour moi, la vraie amitié, ce n’est pas facile, parce qu’aujourd’hui, beaucoup de gens aiment l’argent plus que l’amitié.
Il y a des valeurs, il y a de vrais amis — il y en a, oui, mais pas beaucoup. Il y a de bonnes personnes, et il y a de mauvaises personnes. Il y a des gens qui disent des choses vraies devant toi, et quand tu tournes le dos, ils disent la même chose — ça, c’est bien. Mais il y en a d’autres qui te disent des choses gentilles devant toi, et dès que tu pars, ils disent du mal derrière ton dos. Ça, ce n’est pas de l’amitié.
Mais une vraie, vraie amitié, c’est comme quand je te dis aujourd’hui « mon ami », il n’y a rien d’autre que ça entre nous. Si je te demande deux dollars, tu me les donnes en tant qu’ami, en tant que xaarit. Ça, c’est la vraie amitié. Il y en a, mais pas beaucoup. Et pourtant, quand on donne, on reçoit — et après, ça se solidifie. Oui, ça, c’est vrai.
ACM: Et dans la deuxième chanson, Deug, vous parlez de vérité, d’honnêteté, mais aussi de corruption. Qu’est-ce que la vérité, pour vous?
Seydina: Oui, moi, quand je chante Deug, c’est parce que j’aime la vérité. Même Allah, Dieu, nous dit : quand tu parles, il faut dire la vérité. Parce que la vérité, c’est tellement important, c’est la vie.
Il y a des gens qui jurent, qui disent « billahi wallahi », au nom de Dieu, mais ce qu’ils disent n’est pas vrai. C’est juste une blague ou quelque chose comme ça. Mais quand tu dis quelque chose, il faut le dire la vérité, quelle que soit ce que tu dis. Parce que quand tu dis la vérité, les gens disent souvent : « ah, il est compliqué », ou « il est comme ci, il est comme ça ». Mais la vérité, c’est comme le piment : ça pique. Quand tu dis à quelqu’un « ce que tu fais, ce n’est pas correct, pourquoi tu fais ça ? », il pense que tu es méchant, alors que tu dis la vérité. Parce que parler en disant la vérité, ce n’est pas facile — c’est comme du piment.
Aujourd’hui, beaucoup de gens parlent sans dire la vérité. Ils aiment cacher les choses. Quand moi, je sais que quelque chose est vraie, et que tu viens me donner de l’argent pour me faire changer d’avis, ça, c’est de la malhonnêteté.
ACM: Comment ça se passe au Canada, par rapport à l’influence sur les chansons que vous faites ? Si c’était au Sénégal, auriez-vous peut-être choisi d’autres sujets pour vos chansons ? Y a-t-il des demandes spécifiques, quelque chose qu’on veut entendre?
Seydina: Pour moi, la musique, c’est la musique. Les chansons, c’est quelque chose qui sort du cœur et tout le monde peut l’adopter, à mon avis. Je chante en wolof (langue nationale au Sénégal), mais je sais qu’au Canada, il y a des gens qui aiment qu’on chante en français ou en anglais pour qu’ils comprennent. Mais pour d’autres, ce n’est pas important. L’important, c’est que ça vienne du cœur. Qu’ils comprennent les paroles ou non, ce n’est pas grave. Comme moi, je ne comprends pas tout ce que Bob Marley dit en anglais, mais j’aime ses chansons.
Je chante principalement en wolof, mais un jour, je pense que je chanterai en anglais, en français, tout ça, parce que je fais de la musique pour gagner un peu d’argent, pour rassembler et sensibiliser les gens.
Grâce à ma musique, je joue dans beaucoup de festivals à Montréal, comme le Festival de jazz, les Francofolies, ou les Nuits d’Afrique.
ACM : Alors, où situez-vous votre identité culturelle entre le Canada et le Sénégal? Parle-t-on d’une identité québégalaise?
Seydina : Oui, moi, je suis Québégalais,
parce que même quand je suis venu ici pour jouer, je suis venu pour un festival au Québec, hein. Quand je suis venu ici, c’était pour un festival au Québec, à Saint-Jean-sur-Richelieu. C’est un ami du nom de Boubacar Diaouné, qui m’avait fait venir. Lui, il faisait partie des organisateurs du festival et j’étais venu jouer.
Mais comme je dis, comme Boucar Diouf, comme Élage Diouf, comme tout le monde, on est Québégalais, parce que c’est ici qu’on habite.
Propos recueillis par V. Lim
Xaarit






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