Tunisie : défis politiques et sociaux en 2024
La Tunisie traverse actuellement une phase de turbulences marquées par une conjonction de crises politiques, sociales et économiques. Depuis que le président Kaïs Saïed a consolidé son pouvoir à travers un « coup de force » en juillet 2021, la Tunisie s’enfonce dans un régime de plus en plus autoritaire, ce qui a généré de vives tensions internes et attiré l’attention de la communauté internationale.
Après avoir suspendu le Parlement et pris le contrôle de plusieurs institutions, Kaïs Saïed continue d’exercer une emprise quasi totale sur l’appareil d’État. Les élections présidentielles du mois d’octobre 2024 se sont déroulées dans un climat tendu, marqué par l’emprisonnement de nombreuses figures de l’opposition, comme Rached Ghannouchi, leader du parti islamo-conservateur Ennahda, ainsi que Abir Moussi, figure de l’opposition du Parti destourien libre. L’espace politique semble verrouillé, tandis que la répression des mouvements contestataires et des médias s’intensifie.
Ce contrôle strict a engendré des tensions dans tout le pays, avec des manifestations croissantes pour dénoncer la détérioration des libertés et de la gouvernance. Les observateurs internationaux, quant à eux, pointent du doigt les atteintes à la liberté de la presse et les entraves aux processus électoraux.
Sur le plan économique, la Tunisie peine à se relever de la crise. Bien que les prévisions pour 2024 prévoient une croissance modeste du PIB de 3 %, cette reprise reste fragile. Le chômage élevé, combiné à une inflation persistante et une dette publique conséquente, pèse lourdement sur le quotidien des Tunisiens. Le secteur agricole, notamment les exportations d’huile d’olive et de dattes, offre quelques perspectives positives, mais le pays reste largement tributaire des transferts de fonds de la diaspora tunisienne, qui ont atteint des niveaux records.
Malgré cela, la population continue de subir les conséquences de la stagnation économique, avec des prix en hausse et un accès limité à l’emploi, en particulier pour les jeunes. L’insatisfaction grandit parmi les citoyens tunisiens, qui descendent fréquemment dans la rue pour exprimer leur colère. La crise économique a exacerbé les tensions sociales, et de nombreuses manifestations ont été organisées pour dénoncer l’absence de perspectives économiques, la montée du chômage et les politiques répressives du régime. Les syndicats jouent également un rôle clé dans cette mobilisation, défendant les droits des travailleurs et dénonçant la gestion du pays.
La Tunisie, berceau du Printemps arabe, est aujourd’hui confrontée à un paradoxe. Alors qu’elle avait fait des avancées démocratiques notables après la chute de Ben Ali en 2011, elle semble aujourd’hui revenir à un système autoritaire où les voix dissidentes sont réprimées. Avec des élections présidentielles prévues pour 2024, la situation reste incertaine, et beaucoup se demandent si le régime de Kaïs Saïed parviendra à maintenir sa légitimité face à une population de plus en plus exaspérée par la crise économique et la répression politique.
Par Abdellah Merani
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