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Être journaliste femme: un engagement et de nombreux défis

À l’occasion de la journée internationale de la femme le 8 mars, Reporters sans frontières (RSF) met à l’honneur dix journalistes. Des femmes, aux profils différents, venues des quatre coins du monde, qui nous parlent de leur métier, de leur engagement mais aussi des défis et des risques spécifiques auxquels elles sont confrontées dans le cadre de leur activité professionnelle.

Longtemps réservé aux hommes, le métier de journaliste se féminise. Certaines ont fait le choix de se tourner vers l’investigation et dénoncent des violations des droits de l’homme, la corruption ou des sujets tabous dans une société donnée. Ce travail sur des sujets sensibles dérange et, tout comme leurs collègues masculins, ces journalistes sont victimes d’intimidations, de menaces, d’agressions voire d’assassinat. Mais parce qu’elles sont des femmes, les pressions prennent parfois des formes spécifiques, basées sur le genre, comme des campagnes de diffamation, des violences à caractère sexuel ou des menaces envers leurs familles. Le simple fait d’être une femme journaliste peut être considéré, dans certaines sociétés, comme “contraire aux normes sociales” et être à l’origine de représailles.

Dans une profession qui reste majoritairement masculine, de nombreuses femmes choisissent de garder le silence sur les difficultés et les risques spécifiques auxquelles elles sont exposées dans l’exercice de leur métier. Le bilan dressé par une étude globale de la Fondation internationale des femmes dans les médias (IWMF), publié en 2014, est sans appel. Près des deux-tiers des 977 femmes journalistes interrogées affirment avoir été victimes d’intimidations, de menaces ou d’abus en lien avec leur activité professionnelle. Dans un tiers des cas, le responsable était leur patron. Près de la moitié des femmes journalistes ont été confrontées au harcèlement sexuel et plus d’un cinquième à la violence physique. Malgré l’impact psychologique de ces abus, le silence demeure la règle, la dénonciation, l’exception.

Certaines font le choix de témoigner. “J’ai été régulièrement menacée pendant deux ans par téléphone ou par lettres anonymes (…) Les auteurs m’exhortaient à quitter mon travail auquel cas je serais responsable de la mort des membres de ma famille”. Tel est le triste constat que faisait une journaliste afghane à RSF en 2014. Cette dernière a finalement fait le choix de démissionner tout en rendant publiques les pressions qu’elle a subies. Dans une société patriarcale, l’absence de protection de la part des autorités et l’impunité généralisée nourrit ce cycle de violence et incite certaines femmes à renoncer à leur métier.

La sécurité physique reste de fait un défi constant pour la Syrienne Zaina Erhaim qui forme des citoyens-journalistes dans le nord du pays ou pour l’Afghane Farida Nekzad, fondatrice de l’agence Wakht News Agency. Hla Hla Htay, correspondante de l’Agence France Presse en Birmanie et Marcela Turatti, journaliste freelance pour Proceso au Mexique, abordent les difficultés d’être une femme dans un « métier d’homme ». Noushin Ahmadi Khorasani en Iran et Mae Azango au Libéria témoignent du harcèlement dont elles font l’objet à cause de leur engagement journalistique pour les droits des femmes. Khadija Ismayilova, figure de proue du journalisme d’investigation azerbaïdjanais et Brankica Stanković, grande journaliste serbe ont elles dû faire face à des menaces à caractère sexuel. En République démocratique du Congo, Solange Lusiku Nsimire, seule femme rédactrice en chef d’un journal aux Kivus, s’inquiète pour sa famille, victime d’attaques et de menaces. Une inquiétude partagée par la Marocaine Fatima Al Ifriki qui a suspendu ses publications pour protéger ses proches.

Prenant acte des dangers auxquels les femmes journalistes sont confrontées, le plan d’action des Nations unies sur la sécurité des journalistes et la question de l’impunité souligne “la nécessité d’une approche de genre”. Une approche qui demande à être urgemment mise en oeuvre.

KhadijaLa journaliste d’investigation Khadija Ismaïlova s’est spécialisée sur le thème le plus tabou en Azerbaïdjan : la corruption et les conflits d’intérêts au sommet de l’Etat. En mars 2012, on tente de la faire taire par un chantage à la sextape. Mais loin de mettre un terme à ses enquêtes, la journaliste republie ses principaux articles.

Khadija Ismaïlova rend coup pour coup à un régime bien déterminé à museler toutes voix critiques. A ses risques et périls : traînée dans la boue par les médias officiels, poursuivie pour espionnage et diffamation, régulièrement interpellée, elle finit par être arrêtée, en décembre 2014, sous des accusations absurdes. Depuis plusieurs mois, elle poursuivait inlassablement le combat des principaux défenseurs des droits de l’homme, arrêtés par le régime, en organisant soutien juridique et assistance aux familles, en contribuant à établir une liste de prisonniers politiques, et en alertant quotidiennement la communauté internationale…

Les autorités ont mis Khadija Ismaïlova derrière les barreaux mais n’ont pas brisé sa fougue. Dans les lettres qu’elle fait parvenir à l’extérieur, elle continue de dénoncer le régime et d’appeler à la résistance, ce qui lui vaut d’être placée à l’isolement.

Depuis sa cellule, à quelques dizaines de mètres, le journaliste indépendant Seymour Khazi a rendu hommage à sa collègue, dans une lettre ouverte publiée en janvier 2015 : « Je ne sais pas si nous le devons à l’aspect extrêmement patriarcal de notre société (…), mais lorsqu’ils voulaient exprimer la puissance, la détermination ou le courage d’une femme, nos pères disaient toujours : ‘cette femme est comme un homme’. Aujourd’hui, (…) pour exprimer le caractère et la volonté d’un homme, je dirais plutôt : (…) cet homme est comme Khadija ».

BrankicaBrankica Stanković dirige le programme d’investigation “Insajder” depuis sa création en 2004 par la chaîne de télévision serbe B92. La journaliste, qui a révélé de nombreux scandales de corruption et mis en lumière les liens entre mafia et milieux politique et économique serbes, paye le prix fort pour avoir osé faire son travail.

A mesure qu’elle enchaîne les révélations, les menaces à son encontre se multiplient. Au point de bénéficier depuis 2009, dans tous ses déplacements, d’une escorte permanente de quatre officiers de police. Une mesure extrêmement contraignante mais nécessaire, prise par le ministère de l’Intérieur au moment où les menaces et les insultes à l’encontre de la journalistes s’intensifient, notamment sur les réseaux sociaux.

Le 16 décembre 2009, après la diffusion d’un épisode d’Insajder consacré à la mansuétude de la justice serbe face aux crimes des supporters ultras du Partizan Belgrade, une poupée gonflable à son effigie circule dans les tribunes du club de football lors d’un match européen. Les supporters entonnent des chants promettant à la “pute Brankica” le même sort que Slavko Ćuruvija, journaliste assassiné dix ans plus tôt, pour finir par poignarder le mannequin.

Aujourd’hui, malgré le danger et la contrainte de sa protection policière, Brankica Stanković poursuit son travail d’investigation. En 2013, elle publie un livre autobiographique, Insajder : My Story. Brankica Stanković fait partie des 100 héros de l’information de Reporters sans frontières. Elle a reçu en 2014 le “Courage in Journalism Award” de l’International Women’s Media Foundation.

HLACorrespondante de l’Agence France Presse (AFP) en Birmanie depuis 2004, Hla Hla Htay a commencé à travailler comme journaliste sous le régime répressif de la junte militaire. Elle fut la première à obtenir des photographies de la construction secrète, ordonnée par les généraux paranoïaques au pouvoir, de la nouvelle capitale du pays, Naypyidaw. En 2007, elle couvre la sanglante répression de la « révolution de safran ». Un an plus tard, elle documente les conséquences désastreuses du cyclone Nargis, alors que la censure militaire frappe tous ceux qui exposent l’organisation catastrophique de l’aide humanitaire par les autorités. “Sous la junte, nous étions régulièrement suivis et je devais sans cesse changer de téléphone pour contacter mes sources, cela coûtait très cher”, explique-t-elle.

Durant ces années de dictature, Hla Hla Htay parvient à participer à un programme de journalisme à Rangoun puis à une formation de trois mois au Cambodge, malgré les risques qu’entraîne tout déplacement hors du pays. Après deux ans comme rédactrice pour Today Publishing House, elle rejoint l’AFP dont elle dirige aujourd’hui le bureau de Rangoun.

« Nombreux sont ceux qui pensent que le journalisme est un métier d’homme. Je me souviens que certains collègues masculins aimaient ‘plaisanter’ en disant que c’était grâce à mon ‘pouvoir féminin’ que j’obtenais un scoop ou parvenais à vérifier mes informations, explique Hla Hla Htay. En tant que Birmane, travailler comme journaliste, c’est être confrontée à la question du genre et des tabous culturels. Mais en ce qui me concerne, je fais attention à mon honnêteté professionnelle, et j’essaie de ne pas me soucier de ces discriminations. »

FaridaCo-fondatrice et ex-rédactrice en chef de l’agence de presse Pajhwok Afghan News en 2003, Farida Nekzad a passé les 12 dernières années de sa vie sous la menace des ennemis de la liberté de la presse, qui ont tenté de la kidnapper et de la tuer à plusieurs reprises. En 2007, alors qu’elle enquêtait sur l’assassinat de la journaliste Zakia Zaki, elle reçoit des appels téléphoniques ainsi que des emails lui promettant le même sort que sa consœur. Sa détermination pour défendre la liberté de l’information et les droits des femmes n’en est que renforcée.

En 2008, elle fonde l’agence de presse Wakht News Agency qu’elle dirige toujours et emploie des femmes journalistes afin, notamment, de couvrir la question des droits des femmes dans le pays. Malgré des difficultés financières, l’agence de presse, forte de son réseau de correspondants à travers le pays, demeure l’une des principales sources d’informations indépendantes en Afghanistan.

En 2014, Farida Nekzad est présidente de la Commission des médias, organe interne de la Commission électorale indépendante (CEI) avec pour mandat de surveiller l’impartialité des médias durant la campagne présidentielle. Pendant plusieurs mois, et dans un climat de tensions extrêmes, elle s’attache à répondre aux violations des règles électorales par les médias et à enquêter sur les plaintes du public concernant la couverture des élections.

Lauréate de nombreux prix internationaux, dont le Courage In Journalism Award, remis par l’International Women’s Media Foundation, Farida Nekzad continue d’être le fer de lance de la lutte pour les droits des femmes et milite activement pour une réforme du cadre légal entourant la presse afin que les journalistes soient davantage protégés dans l’exercice souvent périlleux de leur métier.

NoushinNoushin Ahmadi Khorasani est fondatrice et rédactrice en chef du site l’École féministe, l’un des piliers de la lutte pour les droits des femmes en Iran. Figure emblématique des mouvements de défense des droits des femmes, Noushin Ahmadi Khorasani est journaliste, écrivain et traductrice.

Depuis 20 ans, sa plume ne cesse de dénoncer les discriminations et les exactions commises contre les femmes et oeuvre pour faire évoluer la société. Elle est également l’une des fondatrices de la campagne Un million de signatures, qui vise à réformer la législation iranienne afin de mettre fin aux discriminations à l’encontre des femmes iraniennes. Noushin Ahmadi Khorasani et les militantes de ce mouvement ont payé cher le prix de leur activisme.

La journaliste fait l’objet, depuis de nombreuses d’années, d’une pression permanente de la part des autorités. Arrêtée à plusieurs reprises, harcelée quotidiennement pour ses publications et ses appels à la mobilisation, elle a été condamnée en 2012 à un an de prison avec sursis. Son site, toujours bloqué en Iran est une source incontournable d’informations et un lieu de réflexion sur les problématiques des femmes. Des grandes plumes du mouvement des droits des femmes comme Mansoreh Shojai et Azadeh Davachi y contribuent régulièrement.

Depuis la revue périodique Jense dovom (Le Deuxième Sexe) publiée au début des années 90 à son dernier ouvrage intitulé “Shirine veut être la présidente de la République”, cette cyberféministe a publié une vingtaine de livres et une centaine d’articles.

SolangeSeule femme rédactrice en chef d’un journal aux Kivus, Solange Lusiku Nsimire est fière de son mensuel, Le Souverain. Connue pour ses articles d’investigations, la journaliste poursuit l’œuvre de son fondateur : produire un journal indépendant qui reflète une pluralité d’opinions. « Quand nous dénonçons les malversations financières, le communautarisme ou les conditions de travail dans les mines, nous le faisons pour tout le monde, au nom de la liberté de la presse », explique-t-elle.

Cette mère de sept enfants est aussi animée par le désir de raviver une culture de l’écrit que 30 ans de guerre ont fait disparaître. « Je veux contribuer à la mémoire collective du Kivu, dit-elle. Documenter les informations pour les générations futures et aussi pour éviter que la rumeur et la désinformation ne se propagent. » Une tâche pacificatrice essentielle mais difficile qu’elle relève avec brio comme en témoignent tristement les menaces quotidiennes qu’elle reçoit de la part du pouvoir, de l’opposition et même parfois de la société civile. « La neutralité nous coûte cher ».

Au-delà des pages imprimées, cette journaliste engagée porte le débat dans la rue en organisant des revues de presse participatives où les articles sont débattus publiquement entre les populations et les gouvernants locaux. Ses enquêtes politiques et sociales lui valent d’être interdite des conférences de presse des autorités provinciales. Mais, elle peut compter sur les informations de confrères journalistes travaillant pour des rédactions plus frileuses. Est-elle parfois tentée d’arrêter ? « Ce serait me renier moi-même, je ne sais pas faire autre chose ». Un engagement qui n’épargne malheureusement pas sa famille, victime d’attaques et de menaces. « Moi, j’ai choisi mon métier. Mais eux ? Qu’ont-ils fait ? »

MaeCela fait douze ans que Mae est journaliste mais ce sont ses articles publiés depuis 2010 sur les mutilations génitales féminines dans les zones rurales du Liberia qui l’ont fait connaître du grand public.

Dans les sociétés traditionnelles, des « Sande Bush schools » préparent les jeunes filles à leurs futures occupations de mère et de femme mariée. La remise des diplômes consiste en une cérémonie de mutilation génitale. Dans l’article qui lui a valu de vivre cachée pendant un mois, Mae décrit une telle scène, d’une violence inouïe. « Je voulais alerter l’opinion sur le risque de santé publique que représente cette pratique », explique-t-elle. Mais les gardiens de ces sociétés ne l’ont pas entendu de cette oreille. Les intimidations ont commencé à pleuvoir. « Nous allons te couper », la menacent des anonymes au téléphone. Loin de céder à la peur, elle persiste et signe avec un autre article décrivant l’emprise politico-économique de ces sociétés sur le monde rural. Ses publications poussent la présidente Ellen Johnson Sirleaf à condamner en 2013 la mutilation génitale féminine, un sujet extrêmement tabou.

Mais la plume de Mae Azango ne se limite pas aux droits des femmes. Dans une société où les journaux semblent ne s’intéresser qu’à la politique et aux histoires financières, la journaliste veut rendre compte de la vie des gens ordinaires : « J’écris aussi sur les droits de l’hommes, les saisies de terres des paysans, les questions de développement, le trafic d’êtres humains, l’impunité de la police… J’écris pour ceux qui n’ont pas de voix, pour les pauvres, ceux qui n’ont pas de mots, ceux dont le gouvernement ne se préoccupe qu’au moment des élections et qui sont abandonnés ensuite. J’écris pour créer un débat public, pour que le changement puisse avoir lieu.”

MarcelaMarcela Turati, journaliste freelance pour la revue Proceso et fondatrice du “Réseau des journalistes de base” est devenue journaliste en pensant que c’était “un moyen de changer les choses ». Son objectif ? Sensibiliser les lecteurs et les rapprocher des victimes. Marcela est spécialisée dans les enquêtes sur la violence notamment liée aux cartels et ses effets sur la société mexicaine. Un choix loin d’être anodin dans le pays le plus meurtrier des Amériques pour la profession où la sécurité physique reste un défi permanent pour ceux qui enquêtent sur des sujets sensibles.

A ces débuts, elle pensait qu’il n’y avait pas de différence entre un homme et une femme journaliste. Aujourd’hui, elle a changé d’avis : « C’est plus difficile d’être envoyée sur des terrains dangereux, (…) il faut travailler deux ou trois fois plus dur pour y aller, je ne sais pas si c’est du machisme ou de la surprotection mais il faut travailler plus que les hommes”.

Marcela s’inquiète de cette discrimination mais aussi du harcèlement sexuel très prégnant. Elle constate que ces risques ne sont pas pris au sérieux : quand les femmes journalistes révèlent ces pressions, le doute plane. On les traite de folles, d’hystériques. On pense qu’elles veulent attirer l’attention.

Pour améliorer la situation des femmes journalistes, Marcela insiste sur l’importance de mettre fin à l’impunité, de mener des enquêtes avec une perspective de genre et d’offrir une protection adaptée aux victimes.

ZainaDiplômée de l’université de Damas en 2007, Zaina Erhaim poursuit sa formation à Londres lorsque la révolution syrienne éclate en 2011. La jeune femme n’a alors qu’une idée en tête, rentrer chez elle, en Syrie. Multipliant les voyages dans son pays et participant à la mise en place des Comités de coordination locaux, elle obtiendra son Master en journalisme international en 2012.

La voici qui écume les zones libérées au milieu des bombardements, où “compter les martyrs et les barils explosifs est facile”, mais où survivre est un défi permanent. Zaina Erhaim, elle, veut documenter la vie. Raconter “les marchands qui continuent de vendre leurs fruits et légumes sur les ruines d’un bâtiment bombardé …, les enfants qui jouent au milieu des tombes après l’école”.

Compliqué de “prêter (ses) yeux au monde pour qu’il voit ce qu’(elle) voit”. Compliqué et pas suffisant… Il lui faut faire plus. Journaliste, elle aidera ceux qui constituent presque aujourd’hui les seules sources d’information en Syrie : les journalistes-citoyens. Pour que les images et les articles qu’ils réalisent au péril de leur vie soient pris au sérieux et diffusés, Zaina Erhaim deviendra formatrice en 2013.

Depuis deux ans, elle apprend aux journalistes-citoyens d’Alep, Raqqa, Deir Ezzor ou d’Idlib à construire leurs sujets. Elle leur permet également d’être publiés. “Certains écrivent aujourd’hui pour des médias internationaux. C’est gratifiant … d’apprendre qu’un militant a trouvé un emploi au sein d’une chaîne de télévision”.

En plus de son savoir, elle leur transmet sa flamme. Comme elle, ces hommes et ces femmes, caméras et stylos à la main, chassent alors le voile de la violence pour mettre en lumière une autre Syrie. Une Syrie où l’”on s’aime, on se marie, on a des amis, des enfants, … où un peuple admirable lutte pour son futur”. La Syrie, celle qui brille dans le regard de Zaina.

Fatima“Je suis désormais libre. Mes chaînes, je les ai brisées.” Ces paroles, ce sont celles de Fatima Al Ifriki, journaliste marocaine au parcours singulier. Née à Rabat, fille d’un policier et d’une mère au foyer, Fatima choisit le journalisme un peu par hasard et devient en quelques années, une des animatrices vedettes de la chaîne de télévision nationale.

Malgré son succès professionnel, en cette fin d’année 2010, Fatima est inquiète. Les bouleversements dans le monde arabe l’interpelle. Au Maroc, le vote d’une nouvelle Constitution en juillet 2011 ne suffira pas à calmer les esprits qui s’échauffent, glaneurs de rêve et d’espoir pour toute une génération. Le Mouvement du 20 février naît de cette exaltation. Pour Fatima Al Ifriki, c’est aussi une renaissance. “Ces jeunes courageux réclamaient ce dont j’avais toujours rêvé. Ils demandaient plus de liberté et de démocratie ainsi qu’un plus grand respect des droits de l’Homme, alors que nous, l’élite de ce pays, n’avions jamais osé aller aussi loin”, se rappelle-t-elle.

La journaliste s’engage alors pleinement en faveur de la liberté d’expression et d’information. Sa direction décide sa mise au placard. Qu’à cela ne tienne ! C’est par ses contributions hebdomadaires dans des journaux arabophones tels Akhbar Al Yaoum, qu’elle fera entendre sa voix critique, rare au Maroc.

Sa famille ayant été exposée à des menaces, la chroniqueuse cesse un temps d’écrire pour protéger sa vie privée. Quelque mois plus tard, elle trempe de nouveau sa plume et reprend sa collaboration avec Akhbar El Yaoum et sa page électronique, El Yaoum 24. Fatima est parmi les premières à dénoncer l’arrestation d’Ali Anouzla, en septembre 2013. Elle participera à son comité de soutien jusqu’à sa libération.

Si la peur des représailles plane encore, le courage et la volonté de cette journaliste demeurent intacts, comme peut en témoigner la création en 2014, de Freedom Now, association de défense de la liberté de la presse, fondée aux côtés de noms prestigieux parmi lesquels Khadidja Riyadi, militante et lauréate du Prix 2013 des Nations unies pour la cause des droits de l’homme. Cette association s’est pourtant vue signifier une fin de non-recevoir lors de son enregistrement, preuve que le chemin vers la liberté reste encore long et sinueux.

Source: Reporters Sans Frontières

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