Antilles: l’avenir de l’université en six points
Corinne Mencé-Caster, présidente de l’UAG, a présenté mardi soir son projet « pour une université des Antilles ». Deux hypothèses sont envisageables : une université des Antilles ; deux universités : une université de Guadeloupe et une université de Martinique, confédérées ou non. Le ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche devra trancher.
1 La notion de confédération
Aux termes de la loi, la notion de confédération d’établissements renvoie à l’idée de « coordination inter-académique de l’offre de formation et de la stratégie de recherche et de transfert de ces établissements sur la base d’un projet partagé » . Cette éventuelle confédération ne peut donc être concomitante à la création des deux établissements, qu’ils soient dérogatoires ou non. Il faut préalablement créer les universités de Guadeloupe et de Martinique, et répartir entre elles les actuels moyens de l’UAG. Cette confédération devra se fonder sur un « projet partagé » qu’il faudra construire ensemble.
Ce n’est qu’alors qu’une convention d’association pourra matérialiser la confédération. Un délai relativement long sera nécessaire puisqu’il faudra par exemple mettre en place les structures, conseil d’administration en particulier, des établissements.
2 Les écueils
Un certain nombre de questions se posent, dès lors que l’on se situe dans le contexte de création de deux universités distinctes. Voici quelques questions : Comment organiser l’offre de formation sans mettre en péril les niveaux master et doctorat qui, eux, supposent une réelle coordination, vue les nécessités de taille critique (problématique de la continuité et de la qualité de l’offre existante) ?
Comment garantir la continuité et la qualité des formations en médecine et plus largement en santé ?
Comment répondre à la question du numerus clausus, sachant que, dans le cadre de deux universités séparées, les composantes transversales n’ont pas leur place, sauf dans le cadre d’une « communauté d’universités » qui n’est pas une confédération, et qui ne pourrait être mise en oeuvre que dans un temps relativement long ?
Comment penser une coopération interuniversitaire caribéenne et internationale, sans basculer dans une compétition forcenée ?
3 L’attractivité
De fait, il n’est pas certain, selon la gouvernance de l’UAG, que la création de deux universités confédérées ou non, constitue un « plus » pour les étudiants et nos pays.
En effet, elle ne permettra pas nécessairement de répondre de manière satisfaisante aux nécessités d’articulation et de coordination qui restent une réalité incontournable, en raison de la proximité géographique de ces universités, du caractère limité de leurs bassins de recrutement et des contraintes de taille critique, d’attractivité et de rayonnements propres à toute université, dans un contexte concurrentiel exacerbé.
4 Une autonomie forte des deux pôles
Si la création de deux universités distinctes n’apparaît pas, de prime abord, comme une réponse idoine, la mise en oeuvre d’une université des Antilles portée par des pôles autonomes constitue une voie prometteuse. Une gouvernance polaire, dotée de compétences décisionnelles, d’une capacité de gestion administrative et financière, d’une autonomie en matière de formation, notamment pour le cycle licence, permettra à chaque pôle de s’administrer de manière indépendante, tout en renforçant son ancrage territorial et le dialogue direct avec ses partenaires institutionnels les plus proches.
Cette dynamique d’autonomie renforcée et de gestion de proximité permettra, à chacun des pôles, d’être à la fois mieux ancré dans son territoire, tout en se prévalant d’un effectif de 10 000 à 12 000 étudiants, taille critique des universités comme « petites » au niveau national.
5 Consolider l’ancrage caribéen
La volonté de porter un projet d’université des Antilles qui puisse constituer une institution incontournable dans un environnement universitaire caribéen, où rayonne largement l’université des West-Indies, incite à réinventer les modes de coopération interuniversitaire. Les possibilités offertes par la loi ESR (enseignement supérieur et recherche) ouvrent des opportunités de collaboration inédites, permettant précisément d’ancrer plus solidement l’universitédansson environnement régional élargi : association avec des universités caribéennes publiques ou privées fondées sur des projets partagés.
6 Pour quels types de projets ?
Ces projets peuvent être innovants ou répondre à des besoins déjà exprimés par les personnels et étudiants : mobilité étudiante renforcée dans la zone Caraïbe, autour de programmes d’apprentissage des langues en immersion, de stages internationaux, de confrontation avec des modèles pédagogiques et éducatifs autres ; mobilité des personnels, dans une dynamique de maîtrise des langues étrangères, de compétences mutualisées, d’échanges de pratiques professionnelles ; projets de recherche sur des problématiques caribéennes, nécessitant des expertises variées et des expérimentations larges ; programmes de coopération pédagogique autour des écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPE).
Précision
Dans notre interview de la présidente de l’université Corinne Mencé-Caster, a la question : De l’extérieur, on a eu l’impression d’une guerre de tranchée entre la fac de lettres et la fac d’économie et de droit. Qu’en est-il ?
La réponse complète est la suivante : « Si un président de Région, ou d’institution publique, voulait faire la lumière sur des faits qui sont avérés par des magistrats de la Cour des Comptes, de graves soupçons déclarés par un procureur de la République, est-ce qu’on parlerait de guerre de tranchée ? »
Source: France-Antilles
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