Après le sommet de l’OIF : Michaëlle Jean devra panser les plaies laissées par son élection en Afrique
Ce sommet était une occasion idéale de mesurer le degré de confiance et d’unité de chefs d’État et de gouvernement autour de la secrétaire générale de l’OIF ainsi que leur adhésion à son projet novateur de la francophone économique.
Si l’organisation et le déroulement du sommet se sont passés sans trop d’encombres, plusieurs médias ont noté néanmoins une très faible participation de chefs d’État et de gouvernement, notamment africains, chez qui l’on compte le plus grand nombre de francophones.
En effet, quand bien même ce sommet a connu une participation totale et remarquée du Canada, avec la présence de trois chefs de gouvernement et l’adhésion de la province de l’Ontario comme quatrième gouvernement membre observateur de l’OIF, il y a lieu de noter que, pour une organisation qui comptait alors 80 États et gouvernements membres, associés et observateurs, moins d’une vingtaine de dirigeants ont jugé important de faire le déplacement à Antananarivo pour assister à la cérémonie d’ouverture du sommet et entendre le discours inaugural de la secrétaire générale. Au nombre desquels, seulement une douzaine d’Africains.
Parmi les absences les plus remarquées, on a compté non seulement celles de chefs d’État qui étaient moins enthousiastes à l’idée de voir un non-Africain à la direction de l’OIF, mais aussi, et surtout celles de ceux qui furent des fervents soutiens indéfectibles à la candidature de Michaëlle Jean et qui la considéraient comme une descendante d’Afrique.
Ceci dit, l’absence de nombreux chefs d’État africains au premier sommet organisé par la nouvelle secrétaire générale de l’OIF peut être interprétée comme un message clair et sans aucune ambiguïté que soit la connexion n’est toujours pas bien établie avec ceux-ci, soit que les remous suscités par son élection demeurent encore vifs. C’est ici qu’il faut rappeler à Mme Jean qu’elle a encore beaucoup du travail à faire, d’ici au prochain sommet qui sera électif, pour conquérir les cœurs et les esprits de ceux qui rechignent encore à admettre cette évidence.
Il faut noter par ailleurs que le 16e sommet de l’OIF a été précédé par la publication du livre Francophonie : de Hanoï à Dakar, le pacte brisé au contenu tonitruant de Jean-Claude de l’Estrac, qui fut un adversaire farouche de Michaëlle Jean en 2014. Il serait naïf de croire qu’à quelques jours du premier sommet organisé par cette dernière, la sortie de ce livre soit une coïncidence fortuite de la part d’un homme qui a nourri des ambitions pour cette organisation.
Si Michaëlle Jean a l’intention de rempiler, elle devrait aller à la rencontre non seulement des chefs d’État et de gouvernement qui l’ont soutenu et choisi pour diriger l’OIF, mais aussi auprès de ceux qui ont voté contre sa candidature. Elle doit les écouter et leur « vendre » son projet de la francophonie économique, qui a été le thème principal de sa campagne. En faisant notamment valoir le bien-fondé de cette initiative et les progrès déjà accomplis dans sa mise en œuvre.
Ce n’est que de cette façon qu’il sera possible de recueillir davantage le soutien de nombreux États et gouvernements en faveur de l’action de Mme Jean à l’OIF, et ainsi de cicatriser les plaies, apparemment encore ouvertes laissées par ce scrutin historique qui a vu pour la première fois de l’histoire de la Francophonie une femme, non africaine, être élue à la tête de cette organisation.
Isidore KWANDJA NGEMBO, Politologue
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