La Percée, un laboratoire aux services des artistes issus de la diversité
Les Productions Nuits d’Afrique, avec le soutien de l’Observatoire des réseaux et interconnexions de la société numérique ORISON (UQAM) et du Conseil des arts du Canada, a lancé un laboratoire de recherche «La Percée» qui réunit des artistes, des institutions, des universitaires, des experts et d’autres professionnels de l’industrie musicale pour répondre collectivement aux défis de reconnaissance, accessibilité, valorisation, découvrabilité et rayonnement d’une plus grande diversité musicale.
Le concept de découvrabilité numérique réfère au potentiel pour un contenu musical disponible en ligne d’être mis en valeur de telle sorte à pouvoir être repéré, recommandé et découvert par un auditeur qui n’en connaissait pas l’existence ou qui ne le recherchait pas précisément. Rendre accessibles et découvrables les musiques du monde, c’est contribuer à la promotion et à la préservation de la diversité des expressions culturelles ainsi qu’au renforcement du dialogue interculturel et de la cohésion sociale. Aujourd’hui, le processus de découvrabilité permet de transcender les frontières géographiques de la consommation culturelle, tout en augmentant la visibilité des artistes émergents et leur capacité à atteindre des auditoires plus larges, à l’échelle mondiale.
Le lancement du laboratoire dont l’idée était née en 2020 a été marqué par l’exposition du projet dans le cadre de la 37e édition du Festival International Nuits d’Afrique installée le 22-23 juillet 2023 et précédé par deux ateliers. Le concept théorique du projet nommé «Valoriser les musiciens et musiciennes de la diversité et accroître la découvrabilité de leurs musiques à l’ère des plateformes numériques» a été rédigé et publié sur le site du laboratoire lapercee.ca par le Directeur d’ORISON, Prof. Destiny Tchéhouali. Parmi les artistes contribuant au projet se trouvent des musiciens africains connu du public montréalais, notamment Zal Sissokho (Sénégal), Carine au Micro (Benin), Naxx Bitota (RDC), Joyce N’sana (Congo), Djely Tapa et Adama Daou (Mali).
Actuellement, le laboratoire se déploie autour de trois projets :
UN PROGRAMME DE RECHERCHE-ACTION débuté en février 2022 se concentre sur l’élaboration d’un nouveau modèle d’indexation musicale pour transcender la catégorie «Musiques du monde» et valoriser la diversité des genres musicaux qui la composent ;
UNE COMMUNAUTÉ DE PRATIQUE débuté en mars 2023 permet d’échanger sur les défis et les apprentissages, crée du lien entre artistes, chercheurs et acteurs du milieu musical et favoriser l’entraide ;
UNE PLATEFORME DE VALORISATION DES ARCHIVES débuté en septembre 2023 retrace et révèle la riche histoire des artistes et des créations labellisées «Musiques du monde» à Montréal, au Québec et au Canada.
Étant donné que la musique est en constante évolution et incorpore des nombreuses influences et traditions représentées par des sonorités très variées et uniques, le terme «Musiques du monde» ne rend pas justice à l’infinie richesse et à la complexité des identités musicales. Or, les algorithmes de recommandation sur les plateformes numériques se concentrent sur un nombre réduit d’artistes jouissant d’une grande popularité. Ainsi, dans les recommandations des listes de découverte Deezer pour des amateurs francophones de musiques africaines, les biais ont été constatés en faveur des artistes américains ou canadiens de pop ou de jazz. Par conséquent, la communauté de la Percée cherche à répondre aux questions de pertinence de la catégorie «Musiques du monde» sur le web, comprendre ses caractéristiques et les logiques derrière les systèmes de son classement et recommandation, et proposer des pistes d’action pour améliorer les pratiques et les stratégies de sa promotion et mise en valeur.
L’exposition du laboratoire a permis au public du festival de se familiariser avec les projets en cours et a fourni quelques statistiques sur l’écoute de la musique numérique en ligne, notamment :
62% des utilisateurs des plateformes de streaming musical s’abonnent à des playlists, ce qui représente plus de la moitié des écoutes sur ces plateformes.
10 à 13 titres, c’est la moyenne généralement écoutés sur une playlist de 50 titres, ce qui constitue une manifestation du phénomène de concentration de l’écoute.
97% des redevances en matière de diffusion et d’écoute en continu sont perçues par seulement 5% des artistes.
20,1 heures est la moyenne d’écoute hebdomadaire de musique au niveau mondial en 2022 versus 18,4 heures en 2021, soit l’équivalent de 34 chansons de 3 minutes supplémentaires chaque semaine
87% de l’écoute au Canada est mobilisée sur seulement 0,7% des titres disponibles sur la plateforme Spotify.
Par Vladis Lim
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