Maroc : l’embargo sur la Russie fait l’affaire des maraîchers
Depuis que Moscou a décrété un embargo sur les importations en provenance de l’Union européenne, les agriculteurs marocains s’organisent pour profiter de ce marché estimé à 11 milliards d’euros.
L’embargo imposé le 7 août par Moscou sur les importations alimentaires en provenance de l’Union européenne et des États-Unis est tombé comme un cadeau du ciel pour les exploitants agricoles du royaume chérifien. Champions régionaux de la production de primeurs, les Marocains voient en cette sanction russe une chance de booster leurs exportations et de compenser les pertes accusées sur le marché du Vieux Continent.
En mai, l’Union européenne avait en effet annoncé de manière unilatérale une révision des conditions d’entrée des produits agricoles marocains. Une décision qui avait fortement affecté les opérateurs du secteur. Pour beaucoup d’entre eux, l’embargo russe sonne aujourd’hui comme une revanche. « Le hasard fait parfois bien les choses. La décision de l’Union européenne allait causer beaucoup de dégâts. On estimait à 50 000 les pertes d’emploi qui allaient en découler. Avec cette fenêtre ouverte par la Russie, l’optimisme est de retour », note Omar Mounir, grand exploitant agricole de la région du Souss et porte-parole de la Fédération interprofessionnelle des fruits et légumes (FIFL).
Le marché est en effet immense. Les exportations alimentaires européennes vers la Russie ont représenté l’année dernière un chiffre d’affaires de 11 milliards d’euros. Les Marocains ne peuvent pas espérer se substituer seuls à l’Europe, mais ils entendent bien profiter à plein de l’aubaine.
« L’embargo concerne de nombreux produits comme la viande, la volaille, le porc, le fromage, l’huile d’olive, les fruits, les légumes… Nous n’avons pas les capacités pour combler tous ces besoins. Nous allons concentrer notre offensive sur les fruits et légumes, un secteur dans lequel nous disposons de beaucoup d’atouts », détaille Hassan Sentissi, président de l’Association marocaine des exportateurs, l’Asmex.
Les Russes connaissent bien les produits made in Morocco. En 2013, ils ont absorbé plus de 15 % des exportations agricoles marocaines. Pour les agrumes, Moscou est déjà le premier client du royaume (55 % de ses exportations). « Nos clémentines sont présentes sur les tables de tous les Russes. Nous allons tout faire pour augmenter ces parts, maintenant que la concurrence européenne est écartée », insiste un grand producteur d’agrumes de la région de Berkane.
Des premiers contacts avec les importateurs ont déjà été établis. « Nous avons reçu récemment un important acheteur russe qui voulait tout acheter : tomates, poivrons, courgettes, melons… Il s’intéressait également à nos produits de la mer, comme les sardines, certaines variétés de poissons nobles, mais aussi les coquillages », confie un exportateur.
Ordre de bataille
Combien les Marocains espèrent-ils gagner dans cette offensive ? Les opérateurs préfèrent ne pas avancer de chiffres. « Nous sommes encore en période de production. Les choses sont plutôt calmes aujourd’hui. Nous aurons plus de visibilité dès les mois d’octobre et de novembre », signale Omar Mounir.
En attendant, les opérateurs se sont mis en ordre de bataille. Leur stratégie sera dévoilée en marge de la commission mixte maroco-russe qui se tiendra à Rabat du 15 au 17 septembre.
Un « petit sommet » (programmé depuis deux ans déjà) qui réunira responsables politiques et hommes d’affaires des deux pays et qui sera suivi en octobre par une visite du roi Mohammed VI à Moscou.
« Nous allons profiter de ces rencontres pour présenter notre offre globale. L’objectif est de tripler nos échanges dans le domaine agricole. Mais ce sera aussi l’occasion pour faire connaître d’autres produits marocains, comme le textile, le cuir ou le tourisme. Un embargo d’un an, c’est bien pour doper les affaires des exploitants agricoles. Mais si nous nous implantons sur le marché russe, c’est pour y rester », signale Hassan Sentissi, qui est également président de la commission mixte maroco-russe.
Source: Jeune Afrique économie
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