Dernières infos

Opinion/Sénégal: Sur le pétrole comme sur les autres sujets, la personnalisation à outrance fausse le débat

Birame Waltako Ndiaye
Le cafouillage dans l’affaire du pétrole s’explique principalement par l’instrumentalisation politicienne d’un enjeu qui doit pourtant porter sur des questions de droit. Le débat est mal posé parce qu’orienté sur des personnes avant même qu’une violation manifeste ne soit établie incontestablement. Alors que l’opinion s’y frotte et s’y pique encore, voilà que le Front pour la défense du Sénégal en ajoute : « le pays a perdu 600 milliards de francs Cfa dans les contrats sur le pétrole, de 2012 à 2016 ». Cette déclaration à l’emporte-pièce, tapageuse et farfelue, embrouille davantage les citoyens plus qu’elle ne les aide à comprendre.

Dans l’émission Dox dadje, Ousmane Sonko est revenu sur les deux cessions : d’une part sur la nature des titres transférés de Petro-Tim Limited à Timis et d’autre part sur une contrepartie financière dans le transfert entre Timis et Kosmos Energy. Il précise que c’est le caractère de transfert d’actifs qui assujettit la première transaction au paiement d’impôt parce que non couverte par les exonérations prévues par le code pétrolier. En outre, la deuxième opération entre Timis et Kosmos doit aussi entrainer un prélèvement fiscal, dit-il. Cette cession porte sur des engagements d’investissement, mais comprend également une transaction financière, donc taxable, de l’ordre de 150 millions de dollars.

À présent, c’est sur ces questions que le débat doit être orienté et sur lesquelles le gouvernement doit répondre de manière claire et convaincante. En faisant passer exagérément Aliou Sall pour un profiteur et un fraudeur, l’opposition s’est fourvoyée devant l’impossibilité de prouver les parts de M. Sall dans le pétrole et le gaz. En sa qualité d’ex-gérant de Petro-Tim Sénégal, il doit s’expliquer sur des questions controversées, mais la confusion entretenue à tort sur son statut d’actionnaire et d’investisseur est inadmissible.

Ce n’est pas Aliou Sall ou un quelconque membre de la famille du président qui doit, a priori, répondre de quoi que ce soit. C’est le chef de l’État et son cabinet qui nous doit des explications. Faute de quoi, il devra en subir une sanction politique si tant est qu’on est en démocratie. Si la démonstration est faite d’une bonne gestion des dossiers liés au pétrole, nous retiendrons que les adversaires politiques ont eu tort dans leur mission de veille. Autrement, des présomptions de fautes lourdes et de magouilles des élus resteront irréfutables et seront retenues contre eux. Il est plus question de responsabilité, de méthode et de cohérence que d’un désir frénétique de passer à autre chose.

Pour convaincre, il ne s’agit pas de baragouiner des mots savants d’un côté ni de répandre précipitamment des insinuations et des qualifications, de l’autre. Bien plus, il faut démontrer que légalement il y avait lieu d’exonérer d’impôt l’opération entre Petro-Tim Limited et Timis, d’une part. D’autre part, le gouvernement doit persuader que, dans le transfert qui s’est fait entre Timis et Kosmos, il n’a été question que d’engagements à investir. L’argument selon lequel le pétrole est un domaine complexe et réservé aux seuls connaisseurs ne résiste pas à l’obligation d’informer. Le prétexte servi à l’effet qu’il y a un risque de décourager les investisseurs ne tient pas la route.

Par Birame Waltako Ndiaye
waltacko@gmail.com

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.




Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.