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Jean Yves Métellus: « je n’ai pas choisi le style poétique, il s’est imposé à moi »

En entrevue avec Afrikcaraibmontreal, le poète et peintre Jean Yves Métellus a fait avec nous un tour d’horizon sur sa carrière. Presque au milieu de notre entrevue, ce poète depuis son tendre enfance a affirmé: « je n`ai pas choisi le style poétique, il s`est imposé à moi ». Il a publié un recueil de poèmes du nom d’Interlunes. Une œuvre un peu autobiographique.


Bonjour Jean Yves Métellus, pouvez-vous vous présenter?

Me présenter… Ben! Alors, je suis né en Haïti et ne suis plus un jeune homme. (rire). Ça fait environ 8 ans que je suis à Montréal. Avant le Canada, j’ai passé 4 ans aux États-Unis. J’ai quitté les États-Unis à cause de problèmes d’adaptation, entre autres, la difficulté de communiquer en anglais avec un parfait accent. Et être de langage, cela me tuait quasiment! Le Québec est francophone. Donc, l’adaptation est plus facile…En Haïti, j’ai étudié les arts plastiques dans une école d’art : Enarts. Je me suis spécialisé en peinture. Après mes études en arts plastiques, j’ai enseigné la littérature pendant une dizaine d’années au niveau du secondaire…Voilà assez sommairement et
prosaïquement mon profil! Que voulez-vous savoir d`autre?


Vous êtes peintre, chanteur, poète, par où avez-vous commencé?

Je ne me considère pas chanteur. Il m’arrive de chanter des petits airs traditionnels haïtiens. Car cela dégage beaucoup d’émotions et me connecte d`une certaine manière au pays natal. Je participe souvent à des soirées de poésies. À chaque occasion, les gens m`en demandent, car ils aiment ça. Et je leur en donne à cœur joie. Comme j’ai dit précédemment, j`ai une formation en arts plastiques. Donc je suis avant tout peintre. À cause des circonstances socioéconomiques de mon pays, ne pouvant non plus vivre de mon art. Je suis devenu enseignant par la force des choses. Mais j’ai commencé par la peinture, le dessin plus particulièrement, même si l’écriture sommeillait en moi. Car à l’âge de 12 ou 13 ans, j’écrivais déjà. Ce que j’écrivais ne valait pas grand chose, mais j’écrivais. Je lisais des romans, des textes poétiques et surtout des lettres d`amour adressées à ma sœur ainée qui me poussaient à écrire à cet âge-là.

Et parmi tout ce que vous faites en ce moment, à quel art vous consacrez plus de temps?

L’écriture prend plus de place aujourd`hui, la peinture étant un peu encombrante. Je n’ai pas assez d’espace chez moi pour peindre. Je n’ai pas d’atelier de peinture. Par contre, je peux écrire dans mon cellulaire, dans l’autobus, au travail. C`est une activité quotidienne. Je pense que c’est essentiel pour moi. Ça me permet de me trouver, me recentrer face au chaos universel. Ça me nourrit, me rapproche de moi-même, et surtout, des forces invisibles qui s`agitent autour de nous.


Le 30 mai passé, vous avez signé votre recueil de poèmes, Interlunes. De quoi traite ce recueil?

Interlunes, c’est un recueil qui traduit une période transitoire entre l’être que j’étais et celui que je suis appelé à être, avec tout ce que cela comporte de manques, d`extase, de dérives.


Justement, est ce qu’on retrouve cet espace dans tes peintures?

La démarche est peut-être moins consciente en matière de peinture parce que je peins de façon spontanée, sans savoir nécessairement à quoi ça mène, quel en est le sens, à moins que je participe à un projet ayant un thème précis. Avant, j`écrivais aussi de cette manière, mais de plus en plus j`essaie de travailler mes textes tel un corpus, les faisant converger vers une même poétique, peut-être parce que je pense plus à la publication maintenant. Bien entendu, un texte peut naître de lui-même, sortir de moi-même sans mon consentement. Là, c`est différent.

On sait que l’écriture fait partie de toi, pourquoi vous avez porté votre choix sur un style poétique et non sous forme de roman?

Je n`ai pas choisi le style poétique, il s`est imposé à moi. En fait, j’écris aussi des nouvelles. Ça fait longtemps que je travaille sur un roman. Sauf que le roman demande beaucoup plus de souffle, de temps. Le langage romanesque étant plus narrative, il demande d`être nourri de faits, des recherches sont indispensables, qu`il soit biographique ou fictif…etc.. Cela ne veut pas dire que le langage poétique ne demande pas de travail, mais il se rapporte quand même beaucoup plus aux émotions, à ramener peut-être dans l`immédiateté, de façon esthétique, des choses enfouies dans la mémoire ou à décrire notre impossibilité de nous concilier à certaines réalités…les pistes sont variées, en vérité!

Quels sont les écrivains qui t’ont inspiré ou qui t’inspirent?

Quand j’ai commencé à écrire de la poésie, j’écrivais surtout de longs textes. Mon deuxième recueil était un long poème, un seul texte étalé sur plusieurs pages. J’aimais beaucoup Aimé Césaire, surtout dans le Cahier d`un retour au pays natal. Ce poète m`a beaucoup marqué et certainement inspiré par son flot incessant. Puis, René Philocthète, un poète haïtien qui n`abonde pas moins dans le poème à long souffle, une sorte d’oraliture transposée. Mais j`aime aussi des classiques : Baudelaire, Apollinaire, Rimbaud, Hugo, Aragon, Villon, Ferré… Je ne sais pas lequel de ceux-là m`a influencé. Je dirais sans doute tous. (rire). Sinon, je crois avoir mon propre style, ma propre musique, mon propre champ lexical ou esthétique.


Si tu devrais faire un choix entre la poésie et la peinture, ce serait lequel?

Je pense que les deux sont nécessaires, dans la mesure où il y a des émotions qui ne peuvent être traduites par des mots, mais par la force visuelle d`une image. La peinture donne plus à voir des images quand la poésie suggère des images, même si la poésie est réduite à une intention. Je ne pense pas pouvoir faire un choix entre les deux. En peinture, je me déverse tandis qu’en poésie, je me cherche, m’explore, me reconstitue en recollant mes petits morceaux, éparpillés un peu partout. Ce sont deux activités qui se complètent et me sont indispensables dans ma quête existentielle.

Pour finir, quel est votre passe-temps favori?

J’aime beaucoup le cinéma. J`y vais souvent pour m`évader de mon univers immédiat, voyager dans l`imaginaire d`autrui. J’aime aussi les concerts, le théâtre, la danse. En fait, il s`agit encore d`activités artistiques. En Haïti, à côté de l`enseignement, j’écrivais beaucoup sur le monde artistico-culturel. Cela m’a laissé un goût particulier pour cet univers-là, je crois. De sorte que je n`en sors pas, même quand j`essaie de passer le temps. Peut-être, après tout, qu`il ne faut pas passer le temps, mais l`utiliser.

Propos recueillis par Angélique Bonnaire et Ansou Kinty

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