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Langues africaines: entre richesse et termes imagés

Dans certaines langues africaines, comme le wolof, il existe plusieurs façons de désigner « l’amour ». Et comme dans d’autres langues dans le monde, le recours aux périphrases ou aux mots au sens polysémique est monnaie courante. C’est ce qui ressort d’une conférence organisée par l’école de langues africaines ELA Jambo au centre Afrika le 17 janvier dernier.

Animée par trois intervenants, la conférence portait sur les langues africaines et leurs concepts. Le premier intervenant, le philosophe et chercheur en histoire M. Khadim Ndiaye a pu montrer la richesse de la langue wolof: il y a six façons de dire « amour » a-t-il indiqué. De fait, on emploie  » Fonk » ( aimer) en référence au sentiment de respect. Exemple: Aimer ses parents, son pays. Pour ce qui est « d’aimer d’un amour simple comme on aime un objet », les Wolofs utilisent « Bëgg », selon M. Ndiaye, qui est lui même Wolof. Quant à « désirer, aimer quelque chose que l’on désire acquérir », c’est « Xeemeem » qui est utilisé. « Sopp » s’emploie en référence à « aimer quelqu’un avec une sorte sympathie ». « Nop » renvoie à « aimer comme s’aiment des fiancés ». Et enfin « Xédd » est d’usage quand il s’agit « d’aimer d’un amour charnel qui ne cherche qu’à s’assouvir », selon le chercheur en histoire.

M. Ndiaye, qui a publié beaucoup d’articles sur la problématique linguistique en Afrique, a aussi parlé entre autre des difficultés d’apprentissage des Africains à partir d’une langue étrangère, des procédés généraux du raisonnement (déduction, induction, analogie, analyse, synthèse, etc.) dont font usage les Wolofs.

Périphrases et images

Le recours aux périphrases ou aux expressions imagés est très présent dans les langues africaines, comme le bambara (Afrique de l’Ouest) ou le lingala (Afrique Centrale). Pour désigner la pluie, les Bambaras font recours au terme « Sanji » qui veut dire littéralement « l’eau du ciel », a expliqué Kafouné Sangaré, sociologue de formation. La tempête se nomme « Sanfinye » et si on traduit le mot littéralement, ça donne « vent du ciel ». Ce qui met un brin de poésie à leur communication, selon Kafouné Sangaré. Lors de son intervention, Mme Sangaré a également évoqué, parmi d’autres thématiques, la langue bambara comme vecteur de culture ou de préservation de l’identité de ses locuteurs dans un contexte migratoire.

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Dans les langues africaines, les termes choisis pour nommer des choses ou des êtres obéissent à une certaine logique, selon M. Yah Ally Beya Ntumba, professeur des langues ciluba et lingala à Ela Jambo. « Nkosi veut dire lion en lingala. Mais ce mot sonne bizarrement comme Mokonzi ou Mukonzi qui veut dire à la fois chef et roi en lingala », a expliqué M. Ntumba. « Nkosi veut dire Dieu en langue zoulou », a ajouté le professeur. Ce qui lui fait dire que Nkosi = lion, chef, Dieu et roi. « Donc c’est évident parce que le lion, c’est le chef de la forêt et nos ancêtres le savaient parce qu’ils ont vécu dans cette forêt pendant longtemps et ont vu que le lion y faisait la loi », a poursuivi M. Ntumba. Donc ce n’est pas un hasard que Nkosi se nomme lion, chef, roi et Dieu, selon le professeur. Ce dramaturge de profession a multiplié les exemples pour démontrer que « nos ancêtres ne nommaient pas le comos, la nature ou la vie » au hasard.

Il a également démontré que plusieurs langues africaines présentent des ressemblances au niveau du sens et de la morphologie de certains termes. Parmi d’autres exemples, il a cité le mot Mutu ou Moto qui veut dire être humain en lingala.Le terme Muntu, qui ressemble aux deux mots cités précédemment, signifie homme en ciluba, en Swahili et en kikongo, selon le professeur, qui s’intéresse aux similitudes linguistiques entres différentes langues africaines. Il a également fait un rapprochement entre les termes Niit (homme en wolof), Muhutu (homme en kinyarwanda) et Nitu (corps humain en Kikongo).

M. Ntumba ne s’est pas limité à comparer les langues africaines entre elles, il a comparé la langue bambara parlée en Afrique de l’Ouest à l’anglais à travers les termes Tan (qui veut dire 10 en bambara) et Ten (qui veut dire 10 en anglais). Une similitude qui peut rapprocher les deux langues.

Afrikcaraibmontreal.com

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